Né Noel Scott Engel le 9 janvier 1943, Scott Walker, qui a choisi de faire carrière loin de sa terre natale, au Royaume-Uni, a marqué l'histoire de la musique bien au-delà des frontières du pop.
L'aventure commence avec The Walker Brothers, groupe qui, malgré son nom, n'avait de fraternité que l'harmonie vocale. Avec des hits comme « Make It Easy on Yourself » et « The Sun Ain't Gonna Shine Anymore », ils conquièrent le cœur des Britanniques. Cependant, Scott Walker ne tarde pas à quitter cette trajectoire toute tracée pour explorer des contrées musicales inédites.
L'odyssée solo de Walker démarre avec l'album « Scott », une série qui atteindra son apogée avec « Scott 4 ». Chantant Brel en anglais, il s'impose comme un artiste à part, un crooner existentialiste. « Je ne chante pas des chansons d'amour, je chante des chansons sur le sentiment lui-même », disait-il. C'est cette quête d'authenticité, cette volonté de briser les conventions qui le mènent à des œuvres de plus en plus expérimentales, comme « Tilt » ou « The Drift ».
Je ne suis pas un outsider, mais un dissident
Scott Walker
Quant à l'origine de son nom de scène, Scott Walker, il le choisit en référence à un personnage de « The Big Country », incarnant ainsi son amour pour le cinéma et sa quête d'une identité artistique propre. Walker est plus qu'un nom; c'est une marque de singularité et d'audace.
Walker n'a jamais cessé d'expérimenter, de se réinventer, jusqu'à son dernier souffle en 2019. Son œuvre, à la fois sombre et lumineuse, continue d'inspirer. « Je ne suis pas un outsider, mais un dissident », aimait-il à dire. Scott Walker reste une figure emblématique, un dissident musical dont la résonance dépasse le temps et les modes.
L'album : Scott 2
Sorti en 1968, Scott 2 est une exploration audacieuse de sonorités éclectiques, marquant un tournant décisif dans la carrière de l'artiste.
« Scott 2 » se distingue par une fusion de pop orchestrale, de chanson française, et d'arrangements sophistiqués, une alchimie rendue possible par la collaboration entre Walker et le talentueux arrangeur et chef d'orchestre, Peter Knight. L'album se veut une toile de fond pour la voix profonde et mélancolique de Walker, qui navigue avec aisance entre des reprises de Jacques Brel et des compositions originales.
Les sessions d'enregistrement de « Scott 2 » sont teintées d'anecdotes révélant l'exigence artistique de Walker. Il raconte notamment avoir enregistré la voix pour « Plastic Palace People » dans le noir, cherchant à capturer une essence émotionnelle brute. À sa sortie, l'album est salué pour son ambition et sa sophistication, bien qu'il ait divisé certains critiques par son éclectisme.
« Jackie », adaptation anglaise d'une chanson de Brel, devient rapidement un titre phare de l'album, controversé pour ses paroles audacieuses et son exubérance orchestrale. Walker décrit cette chanson comme un « exutoire cathartique », illustrant sa capacité à fusionner humour noir et profondeur émotionnelle.
Avec le temps, « Scott 2 » s'est imposé comme une œuvre culte, son influence perdurant dans les générations d'artistes cherchant à briser les conventions musicales. « Cet album est un voyage dans le temps, pas seulement une époque, mais les multiples vies émotionnelles que la musique peut incarner », a déclaré Walker lors d'une rare interview.
La chanson : Jacky
Parmi les trésors de l'album « Scott 2 » de Scott Walker, « Jackie » se distingue comme un choix incontournable. Cette adaptation audacieuse d'une chanson de Jacques Brel (originellement « La chanson de Jacky ») capture l'essence de l'album par son mélange unique d'humour noir, de mélancolie et d'orchestrations grandioses.
« Jackie » raconte les fantasmes d'un personnage ordinaire aspirant à une vie extraordinaire, pleine de débauche et de glamour. Les paroles oscillent entre rêve et réalité, évoquant avec ironie les hauts et les bas de la célébrité. Walker injecte dans « Jackie » une dose de satire sociale, se moquant des aspirations et des illusions de grandeur.